Chers amis du Sens de l’Humus, l’automne approche à grands pas, au grand désespoir de certains qui après le printemps et l’été pourri qu’on vient de subir n’imaginent pas d’autre issue, pour avoir un potager digne de ce nom, que d’attendre le printemps prochain en espérant qu’il soit moins pourri. Selon une idée très répandue en effet, la saison des semis et plantations va de mars à l’été, en automne on finit de récolter et on sème des engrais verts, et en hiver on se fait chier en attendant le mois de mars suivant. Une telle idée est si répandue qu’elle contamine même les maraîchers de certaines AMAPs, qui de janvier à avril, et ce en toute bonne foi, servent à leurs bienfaiteurs des paniers ne contenant que des patates et des poireaux, avec deux ou trois carottes pour la couleur. Il est temps d’en finir avec une telle idée, et de découvrir à quel point le début de l’automne est aussi plein de promesses que le début du printemps (avec ceci d’avantageux que s’il fait un temps pourri en novembre c’est moins désolant qu’en mai). Ainsi je vous mets ici une ébauche de catalogue d’idées automne-hiver pour continuer à occuper élégamment votre bout de terrain pendant la saison sombre.
À l’instar du mois de mars, dont on pourrait dire que c’est le symétrique, le mois de septembre est un mois d’équinoxe, et c’est le temps où on récolte certaines choses, mais aussi où on en sème d’autres, notamment :
– Le chou frisé (ou chou vert). Certains préconisent de le semer en début d’été et de le repiquer en juillet-août. Pour ma part je préfère le semer maintenant et le repiquer mi-octobre, pour 3 raisons : il ne souffira pas de gros coups de chaleur, sa production sera décalée vers la fin de l’hiver et le début du printemps, ce qui est appréciable en cette période transitoire généralement pauvre en verdures, et surtout, comme son début de croissance aura lieu fin octobre, il sera bien plus épargné par les limaces que s’il était repiqué en juillet. Car un des avantages non négligeables du jardinage de saison froide, c’est qu’il n’y a pas de limaces, chose éminemment appréciable quand on cultive des brassicacées.
Parmi les avantages du chou frisé sur le chou cabus (le chou classique, celui qui fait une grosse boule de feuilles), il est beaucoup plus riche en micronutriments, c’est même un des légumes les plus nutritifs qui soient. Il est également est plus facile à cultiver, il n’est pas où très peu attaqué par la piéride (chenille), et sa récolte est continue de janvier à mai, on coupe les feuilles dont on a besoin, et s’il ne fait pas trop froid ça repousse, que rêver de mieux.
En régions très froides on trouve la variété Westlandse Winter, en régions douces on pourra essayer le Branchu du Poitou (essai chez moi l’hiver dernier, il résiste au moins à -5ºC), il y a également le Vert Demi Nain qui pousse à peu près partout.
– Pour ne pas avoir à attendre autant pour manger du brassicacé, il y en a un autre qui se sème maintenant pour une récolte de novembre à janvier : le navet. Également très riche nutritionnellement, il mériterait d’être plus consommé, notamment ses feuilles, trop souvent délaissées, car ce sont les parties les plus riches de ce légume. Pour ceux qui aiment, vous pouvez également faire du radis noir, qui en plus des qualités habituelles des brassicacées a des vertus dépuratives pour le foie.
– Dans la série des autres trucs ultra-riches qui se sèment en cette période, on peut noter l’épinard, la bette et la mâche, qui sont eux aussi des mines de micronutriments. La mâche se sème en direct jusqu’à fin octobre, l’épinard et la bette en direct ou en caissettes (puis repiquage). Précaution : si vous mangez beaucoup d’épinards et de bettes ne les mangez pas trop souvent crus à cause de l’acide oxalique.
– En plus de la mâche, en salades et assimilés il y a aussi la chicorée sauvage (dernier moment pour le semis), la laitue d’hiver (notamment les romaines rouges, craignant moins les limaces d’après certaines observations), la laitue à couper, et bien sûr la roquette (une autre brassicacée).
– En légumes de base à cultiver en grandes quantités (les fameux « calorie-crops » de la méthode biointensive), on n’oubliera pas le poireau, qui se repique de l’été jusqu’à mi-octobre (voire plus tard dans certains régions) pour être récolté tout au long de l’hiver, ainsi que le panais, qui si vous n’êtes pas dans une région trop froide peut aussi se semer en ce moment pour une récolte en mai-juin. Ensuite, vers novembre, ce sera le moment de planter l’ail.
– On n’oubliera pas non plus l’oignon blanc et le persil, c’est le moment pour semer le premier (repiquage fin novembre), c’est le dernier moment pour semer le second, ils agrémenteront tous deux vos salades printanières. Le persil est un condiment particulièrement riche nutritionnellement, et pas seulement en vitamine C. Si vous aimez, mettez-en partout.
Comme quoi finalement, l’automne et l’hiver, ça peut être sympa.
Et mardi prochain c’est la nouvelle Lune, préparez vos graines!
Pour finir, septembre est aussi le temps des premières feuilles mortes et des champignons, ce qui en fait une excellente période pour étaler ou incorporer du brf. Si vous en faites maintenant et que vous y semez ensuite des fèves (estimable plante donnant moult biomasse à humus pour nourrir tout ce beau monde, et moult grains riches en protéines pour nourrir la/e jardinier(e) qui s’en occupe), d’une part les champignons auront le temps de bien l’attaquer avant qu’il fasse froid, d’autre part les fèves apporteront de l’azote pour compenser la faim du même nom (qu’est-ce qu’elles sont sympa ces fèves), et ça vous donnera des conditions optimales pour y mettre ensuite des légumes d’été gourmands en humus, comme la courgette.
Merci à Mirza qui m’a donné l’idée d’écrire ce billet.
« À l’instar du mois de mars, dont on pourrait dire que c’est le symétrique, le mois de septembre »
Je conteste cette phrase. Si le 22/03 est le symétrique du 22/09 (à peu près) pour la durée du jour, tout le reste diffère. Ainsi, le 01/03 n’est pas le symétrique du 01/09 ni du 30/09.
Globalement, le mois de septembre voit beaucoup plus d’heures de jour et moins d’heures de nuits que mars. De plus, il y a déphasage des températures et durée du jour, d’environ 1 mois : ainsi le 21/09 est bien plus chaud que le 21/03. Théoriquement le 21/9 est plus chaud que la moyenne annuel, et le 21/03 plus froid. La chute des températures moyennes, qui a lieu du 21/07 au 21/01 en moyenne (source RTE), voit plutot son milieu le 20/10, son « équinoxe »(l’autre étant vers le 20/4).
On pourrait dire que je m’acharne sur des détails. En fait, les déphasages température/durée du jour, la variabilité de la météo d’une année sur l’autre , ont toute leur importance puisqu’elles permettent d’améliorer la performance des chauffage solaires, plus le déphasage est important, plus ils sont performants. Et puis surtout, ces déphasages donnent tout leur piquant aux hivers et à la Vie. Parce qu’il y a lieu de constater entre autres qu’il est heureux que les températures les plus froides n’ont pas lieu au moment où les jours sont les plus courts et réciproquement et inversement. Il n’y a de mouvement régulier et méthématisable excepté pour la durée du jour, et par malchance les solstices et équinoxes ne tombent pas le 15 ou le premier du mois.
halala